Frère d’âme
David Diop
Seuil
Prix Goncourt des lycéens
David Diop frappe fort avec ce premier roman qui nous plonge dans l’enfer des tranchées en compagnie d’Alfa Ndiaye, tirailleur sénégalais.
Alfa a vu son meilleur ami, « son frère d’âme », Mademba mourir entre ses mains. Il a refusé de l’achever malgré les supplications de son ami. Alors Alfa décide de devenir un sauvage d’entre les sauvages, un « dévoreur d’âme ». A chaque assaut il se faufile derrière les lignes ennemies et en rapporte une main en trophée. Les regards de ses compagnons d’armes d’abord admiratifs se muent rapidement en suspicion puis en terreur. « Le sauvage » serait devenu trop sauvage, trop fou, trop incontrôlable.
Alfa est-il devenu fou ? Peut-être bien… Peut-être également que la folie était le seul moyen de préserver son humanité face à l’horreur de la guerre.
Citations :
« À la guerre, quand on a un problème avec un de ses propres soldats, on le fait tuer par les ennemis. C'est plus pratique. »
« Par la vérité de Dieu, il faut être fou pour s’extraire hurlant comme un sauvage du ventre de la terre. »
« La France du capitaine a besoin que nous fassions les sauvages quand ça l’arrange. Elle a besoin que nous soyons sauvages parce que les ennemis ont peur de nos coupe-coupe. Je sais, j’ai compris, ce n’est pas plus compliqué que ça. »
« La folie temporaire permet d'oublier la vérité des balles. La folie temporaire est la sœur du courage à la guerre. »
« Non, je sais, j’ai compris, je n’aurais pas dû écouter cette voix explosant dans ma tête. J’aurais dû la faire taire pendant qu’il était encore temps. J’aurais déjà dû commencer à penser par moi-même. J’aurais dû, Mademba, t’achever par amitié pour que tu cesses de pleurer, de gigoter, de te tortiller tâchant de faire rentrer au-dedans de ton ventre ce qui en était sorti, aspirant l’air comme un poisson tout juste pêché. »
« le capitaine aime la guerre, comme on aime une femme capricieuse. Le capitaine passe tous ses caprices à la guerre. Il la couvre de cadeaux, il la fournit en vies de soldats. »
« Quand je sors du ventre de la terre, je suis inhumain par choix, je deviens inhumain un tout petit peu. Non pas parce que le capitaine me l'a commandé, mais parce que je l'ai pensé et voulu. »