Ancienne prostituée, Madame Rosa a monté un ''clandé'' dans son appartement pour accueillir des ''fils de putes'' et les soustraire à l'Assistance publique. C'est là que vivent Momo, Moïse, Banania et d'autres enfants, plus ou moins de passage.
Le roman est tendre et drôle. On ne peut s'empêcher de penser que c'est un monde disparu que Romain Gary nous décrit, celui des quartiers populaires des années 1970, habité par une faune bigarrée d'individus hauts en couleur, où la fraternité n'est pas un vain mot, où les immigrés trouvent une place dans la société, où un petit Arabe aide une vieille Juive à se cacher dans son ''trou juif '' parce que les peurs de la rafle de 1942n'ont pas disparu, parce qu'ils (les Allemands) vont revenir pour la mettre à l'hôpital.
Dès l'incipit, le lecteur est pris par surprise par le langage bancal de Momo, le narrateur. Les mots de français qu'il entend et répète, il ne les connaît pas tous, ou bien de travers, ou bien leur attribue un sens très personnel, la syntaxe est approximative. Tout au long du roman, le lecteur est pris à revers par un langage qui n'est pas académique et qu'il faut décrypter à chaque ligne. Nous sommes dans la position du Dr Katz qui, cherchant à hospitaliser Madame Rosa, entend parler de la faire « avorter », du « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes » et « qu'il faut un médecin juif pour ça pour ne pas avoir d'antisémitisme » :
- « Le docteur Katz respirait de plus en plus et il avait même des gouttes de sueur sur le front, tellement je parlais bien […] :
Tu ne sais pas ce que tu dis, mon enfant, tu ne sais pas ce que tu dis ».