DOGGERLAND

Elisabeth FILHOL

Editions P.O.L (2019)

Doggerland est un roman fascinant, à nul autre pareil. Plus il nous livre des informations scientifiques sur ce qu'était le Doggerland, plus il nous parle de géologie, d'archéologie sous-marine, plus le lecteur s'extasie sur la somme de connaissances qui nous parvient.

Le Doggerland était une terre émergée au milieu de la mer du Nord qui reliait l'Angleterre au continent, puis une île, avant d'être submergée par la montée des eaux au VI° millénaire avant JC.  Il a réuni Margareth et Marc lors de leurs études, puis les a séparés, l'une continuant dans la voie de la recherche et l'autre dans celle de l'exploitation pétrolière, avant de leur donner l'occasion de se revoir vingt ans après lors d'un congrès réunissant scientifiques et industriels. Mais ce jour-là se lève la tempête hivernale Xaver, un monstre surgi du néant de la mer d'Islande, qui risque de compromettre tout projet...

Le bruit, la fureur, la force des vents, le danger, la montée des eaux, l'angoisse des hommes font de Xaver le personnage incontournable du roman, celui qui accompagne les faits et gestes de chacun et dramatise la situation. Il faut bien donner de la force à un récit très érudit, dont on craint qu'il ne soit hermétique. Et c'est le contraire qui se produit car Elisabeth Fillol sait lui donner de la force, transcender les explications scientifiques par la puissance évocatrice de la tempête et les sublimer par la poésie et le merveilleux qu'elle introduit. Car connaissez-vous l'histoire des forêts englouties du Doggerland qui réveille les vieilles légendes qui courent dans la région, celles qui parlent « d'un territoire ou d'une ville englouties, transmis en mémoire aux générations futures, comme le royaume antique de Cantre'r Gwaelod ou les terres perdues de Lyonnesse ».

Eco-fiction d'actualité, Doggerland nous interroge sur les dangers liés au réchauffement climatique et sur la place que s'accorde l'homme dans la nature. Elisabeth Filhol le fait dans un style époustouflant où la longue phrase, qui s'enroule, s'allonge et avance dans le récit n'est que la métaphore étouffante de l'urgence du défi. Fascinant, vous disais-je.